[Dual Powers : Révolution 1917] Modelez votre mère patrie, (ré)écrivez l’histoire de la Russie !

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Avant de vous proposer ces lignes, l’équipe de choc des Don’t Panic Games s’est demandée : Diantre, mais comment arriver à « enjailler  » la communauté ludique sur le jeu Dual Powers : Révolution 1917, alors que toutes nos ressources ont été déployées pour lancer les jeux AboveCowboy: Bebop Space Serenade, Malfosse 1949, Escape Quest 6Maraudeurs de Midgard (entre autres), faire un FiJ 2020 du tonnerre, le tout en entrant dans cette étrange période historique propre à l’année 2020 ?
Et c’est là qu’une future Community Manageuse en herbe, Anna Lyakisheva, intervint. Formée par nos soins, on lui a demandé de vous rédiger une explication complète recelant tous les éléments historiques, politiques et contextuels propres à l’année 1917, et ceci rien qu’en utilisant le contenu de Dual Powers : Révolution 1917, conçu par Brett Myers et illustré par Kwanchai Moriya.
Et maintenant, trève de compliments camarades, et place à l’Histoire de la Révolution de Russie.

L’année 1917 fut fatale pour l’Empire Russe.

Tout au début du siècle, le pays croissait économiqement après les réformes de Stolipine  tandis que l’éducation et la culture fleurissaient rapidement avec l’apparition des oeuvres de TolstoïTchekhovSerov ou encore les ballets de Dyagilev.  Les différents échecs  de l’empire, propre à la guerre de 1914,  secouèrent violament l’économie du pays : grèves ouvrières, manifestations dans les rues de Saint-Pétersbourg, famine causée par le manque de main d’oeuvre dans les champs …  la société se perdit petit à petit dans les doutes, submergée par le sentiment d’opposition profonde. Le pouvoir du tsar Nicolas II affaibli, de nouveaux partis libéraux émergents s’opposèrent au gouvernement et le peuple perdit la confiance en la monarchie en place. La révolution commençait à petit feu, éclatant ensuite comme le tonnerre; nul ne put prédire une telle ampleur et une telle vitesse dans le déroulement des faits.
Nicolas II, forcé par l’opposition, abdique. Les parties libéraux et socialistes formèrent un gouvernement provisoire. En parallèle, un autre organisme politique – le Conseil de Petrograd des députés des paysans et des soldats (Soviet de Petrograd), apparut. Ce phénomène sera plus tard appelé « dvoevlastie », ce qui signifie « deux pouvoirs ».

Le parti des bolchéviks décida de mettre fin à l’incertitude gouvernementale en prenant le pouvoir par la force à Petrograd. Au cours de la nuit du 24 au 25 octobre les troupes révolutionnaires prirent le  contrôle de tous les points clefs et les points de communication de la ville (les gares, le télégraphe, les ponts) et ils prient également d’assaut le Palais d’Hiver : l’ancienne résidence des tsars et le quartier général du Gouvernement provisoire. Les membres de ce dernier furent arrêtés et le pouvoir passa sous le contrôle des Soviets.

Ainsi commença une nouvelle ère dans l’histoire de la Russie. Mais tout aurait tout autant pu se passer d’une manière complètement différente…

Les principaux acteurs de la révolution de 1917 :

  • Georgiy Lvov (1861 – 1925) – Georgivy fut prince, descendant de Rurikovich (la première dynastie des tsars en Russie, provenant des vikings et des empereurs byzantins), partisan des idées de l’opposition au tsar. Il dirigeait l’union foncière russe (Zemstvo), qui était engagée dans l’aide charitable aux familles des soldats de première ligne, les malades et les blessés. Premier chef de l’état provisoire, il avait la réputation d’être un homme objectif et sincère. Incapable de satisfaire aux demandes du peuple, il dut laisser sa place à son ministre de la guerre, Kerenski. 
  • Alexander Kerenski (1881-1970) – fils du directeur du gymnase de la ville de Simbirsk (la ville natale de Vladimir Lénine). Il a reçu une formation juridique supérieure à l’Université de Saint-Pétersbourg. Il a été arrêté pour ses publications révolutionnaires antitsaristes, mais libéré par manque de preuves. Il  a gagné la renommée en tant qu’avocat défendant les révolutionnaires et les paysans rebelles. Il était également l’un des dirigeants de la franc-maçonnerie politique russe. Kerenski était réputé pour être un excellent orateur. Après l’abdication de Nicolas II, il devint l’intermédiaire entre le Soviet et le gouvernement provisoire dont il faisait partie en tant que ministre de la Justice. En mai 1917 Kerenski devient ministre de la guerre, mais fut très critiqué pour ses échecs militaires. Il remplaça Lvov après son départ du poste du chef du gouvernement provisoire.
  • Général Lavr Kornilov (1870-1918) – fils d’un fonctionnaire, il a commencé sa carrière militaire très jeune. Il fit sa réputation après son succès lors de la guerre russo-japonaise (1904-1905) et au début de la Première Guerre Mondiale. Depuis mars 1917, il commandait les troupes du district militaire de Petrograd. En août, Kerenski le nomma Commandant-en-Chef. Ces deux hommes, bien qu’à la tête du gouvernement, avaient des vues politiques différentes. Kornilovvoyait la force armée en tant que seul solution face au chaos qui sévissait en ville, mais Kerenski était contre ses propos. Leur conflit se termina par la tentative de Kornilov de putsch via l’envoi des troupes militaires à Petrograd, mais Kerenski anticipa la manœuvre et arrêta Kornilov. En septembre, après son évasion, Kornilov dirigeait les troupes antibolcheviques jusqu’à sa mort en 1918.
  • Vladimir Oulianov (Lénine) (1870-1924) – fils de l’inspecteur des écoles du peuple à Simbirsk il hérita de son titre de noblesse grâce à sa famille. Encore étudiant, le jeune marxiste Lénine rejoignit les clubs révolutionnaires, fut arrêté à plusieurs reprises, et se réfugia même en Sibérie. Lénine fut l’un des fondateurs dirigeants du Parti social-démocrate, et après sa scission, il se mit à la tête de l’aile bolchevique. Puis, après l’échec de la première révolution russe (1905-1907), Lénine s’exila en Europe occidentale. Il se révolta par la suite contre le gouvernement provisoire qu’il considérait comme impérialiste. Il affirma que le gouvernement devait laisser sa place au peuple et que le pouvoir revenait aux ouvriers, aux paysans et aux soldats. En octobre 1917 il devient le premier chef de l’État soviétique.
  • Joseph Djugachvili-Staline (1879-1953) – Staline était issue d’une famille géorgienne pauvre. Étudiant dans une école religieuse, il en fut exclu pour son appartenance aux clubs révolutionnaires. En 1905 il fait connaissance avec Lénine. À l’époque de la révolution de février, Staline était déjà un membre du parti bolchevique. Il contrôlait le journal bolchévique Pravda dont l’éditeur-en-chef était Lénine. Après la révolution d’octobre, il devint un des quatre chefs du nouveau régime aux côtés de Lénine et se mit à la tête du parti bolchévique. En 1924, après la mort de Lénine il s’immisça petit à petit jusqu’à atteindre la place du leader unique du jeune pays des Soviets où il garda le pouvoir jusqu’à sa mort en 1953.
  • Grigoriy Radomyslski (Zinoviev) (1883-1936) – fils d’un fermier laitier juif, révolutionnaire dès son plus jeune âge, il immigra en Europe après avoir organisé des manifestations en Russie du sud. C’est en Suisse il fit connaissance avec Lénine. Pendant de nombreuses années, Zinoviev fut l’un des plus proches de ce dernier, jusqu’à devenir son avocat et son représentant officiel. Après avoir rejoint le parti bolchévique, il retourna à plusieurs reprises en Russie pour organiser des manifestations. En octobre 1917, avec un autre représentant du parti, Kamenev, Zinoviev s’opposa à la révolution en utilisant la force, ce que Lénine interpréta comme une  grande trahison. Finalement, en se réconciliant avec Lénine grâce à son talent d’orateur, Zinoviev aida à de gagner la confiance du peuple pour le nouveau régime communiste. Malgré le fait que Zinoviev ait joué un rôle important dans la montée de Staline, il fut ensuite arrêté et exécuté en 1936 par ce dernier.
  • Lev Bronstein (Trotski) (1879 -1940) – le fils d’un grand propriétaire foncier juif, il intégra des groupes révolutionnaires très tôt dans sa jeunesse. Passionné par le marxisme, il devient un journaliste engagé. Il devint l’un des dirigeants de la première révolution russe de 1905-1907. Il fut ensuite arrêté et exilé en Sibérie, mais s’est échappa et  parti se réfugier aux  États-Unis. Trotskifut l’un des principaux théoriciens du parti socio-démocratique en soutenant une approche plus démocratique du socialisme. À son retour en Russie,  lorsque la révolution de février éclata, il se rangea du côté bolchévique.En août 1917, il fut accueilli au sein du cercle de Lénine, partageant ses idées. Il aida à renverser le gouvernement provisoire par la prise de contrôle des forces militaires de Petrograd. Après la révolution d’octobre, Trotski joua un rôle clé dans la victoire des Soviétiques dans la guerre civile, en devenant l’un des fondateurs, puis commandant en chef, de l’Armée rouge. C’est le désir de Staline pour le pouvoir unique qui a conduit ce dernier à la mise à l’écart de Trotski. En 1929, il fut expulsé de l’Union soviétique, vécut au Mexique où il écrivit un certain nombre de livres historiques, et travailla au renforcement du mouvement communiste international. Il fut tué par un agent du renseignement soviétique en 1940.

Petrograd

« ville de Pierre », fondé en 1703 par Pierre le Grand d’où son nom, carte de 1917

 

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Pierre le Grand déplaça la capitale de l’Empire russe de Moscou à Saint-Petersbourg. C’était le lieu du couronnement des tsars et le lieu de la résidence des Romanov. Après l’engagement de la Russie dans la Première Guerre Mondiale contre l’Allemagne, le nom allemand de la ville fut remplacé par un nom analogue russe : Petrograd. Il est considéré que Petrograd était une représentation du tsarisme. En 1918 Lénine transféra la capitale de la Russie de nouveau à Moscou. Cependant, cette décision fut plus influencée par la position géographique de la ville qui était proche des fronts de la Guerre civile. A Moscou le gouvernement bolchévique était plus en sécurité.

Déroulé des évènements

Le saviez-vous ? Jusqu’en 1918  la Russie suivait le calendrier julien ; l’écart entre ce calendrier et le calendrier grégorien (le notre actuellement) est de 13 jours !

  • 23 février – Journée internationale de la femme (8 mars d’après le nouveau calendrier) ; les manifestants ouvriers industriels se joignent aux femmes en grève à Petrograd en protestant contre les pénuiries de nourriture et contre la guerre
  • 26 février – Nicolas II ordonne à la garnison militaire d’utiliser la force pour réprimer les émeutes
  • 27 février – une des troupes militaires refuse de tirer sur les manifestants et la garnison rejoint les révolutionnaires ; se forme le Soviet de Petrograd
  • 2 mars – Nicolas II abdique ; formation du gouvernement provisoire
  • 3 avril – Lénine rentre de l’exil et publie ses « Thèses d’avril » où il explique la politique des bolcheviques
  • 20-21 avril – chute du premier gouvernement provisoire
  • 5 mai – formation du gouvernement de coalition
  • 3 juin – premier rassemblement du Congrès des députés ouvriers et soldats de toute la Russie
  • 16 juin – échec de l’offensive contre l’Allemangne dirigée par Kerenski ; les soldats ne veulent plus se battre
  • 3-7 juillet – Manifestations soutenues par les bolcheviques ; Lvov démissionne et Kerenski prend le pouvoir, le siège du parti de Lénine est perquisitionné, plusieurs responsables sont arretés, Lénine fuit avec Zinoviev en Finlande
  • 22-27 aout – le général Kornilov déplace ses troupes vers Petrograd et demande qu’on lui remette l’autorité civile et militaire, mais Kerenski voit ceci en tant qu’une tentative de coup d’Etat
  • 1 septembre – la République de Russie est officiellement déclarée
  • 25 octobre – les ouvriers et les soldats armés prennent prennent les points clefs de la ville ; Kerenski s’enfuit
  • 26 octobre – le pouvoir passe aux Soviets ; l’abolition de la peine de mort et de la proprieté privée ; formation d’un gouvernement bolchévique avec Lénine à sa tête.

Ce sujet ombragé et sinistre provoque encore aujourd’hui des débats sur les décisions prises, les positionnements et la stratégie politique des acteurs principaux. Même 100 ans après, après avoir vu ce qu’a apporté la politique communiste et l’État soviétique, il est difficile pour nous à percevoir les limites entre le bien et le mal et de nous mettre du côté d’un des partis politiques.

Le jeu Dual Powers : Révolution 1917 vous propose de vous mettre à la place des grands dirigeants bolchéviques faisant partie du Soviet de Petrograd et ceux du Gouvernement provisoire. Bien sûr, nous ne refaisons pas l’Histoire avec des suppositions, mais dans ce duel peut, ludiquement, tout changer !

En complément de votre lecture : 

Pendant 2 semaines, tous les soirs jusqu’au vendredi 12 juin, journée nationale de la Russie,  nous avions dévoilé sur notre page Instagram les éléments les plus croustillants de ce dossier que nous vous réservions. Nous avons adoré vos réactions ! Nous remercions d’ailleurs l’ensemble de la  communauté ludique, joueuses comme joueurs de dés, de cartes, de tuiles et de figurines : votre soutien nous est précieux !

Un grand merci à la chaîne Twitch Dice Club qui nous a permis de réaliser un live de la version solo de Dual Powers : Révolution 1917.

Un grand merci pour votre lecture !

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